Il est 13h30. Les volets sont fermés. Chaque élève de petite
section est couché sur sa couchette bleue. Il y a souvent 5 ou 6 élèves en
moins que le matin, puisque les parents qui le peuvent gardent encore souvent
leurs enfants l’après-midi.
Chut, plus de bruit,
« on dort, c’est la sieste ». Il y a ceux qui s’endorment à peine la
tête posée sur leur oreiller. Il y a celui qui demande où est sa maman. Il y a
celle qui demande si elle peut enlever ses chaussettes, pour les remettre 2
minutes plus tard. Il y a celui qui veut qu’on lui prête un doudou « le
chat, non pas celui là, le chat gris » (en fait c’est une souris). Il y a
celui qui bouge tout le temps, qui se réveillera avec un œil poché, et qui ne se souviendra pas s’être cogné où que
ce soit. Il y a ceux qui disent ne pas
avoir sommeil en se frottant les yeux.
La maîtresse et l’Atsem demande le silence et demande aux
enfants de ne plus bouger et de dormir ! Elles caressent les petites
joues, remettent les couvertures en place…
Et incroyablement, au bout d’une vingtaine de minutes, ça
fonctionne ! L’Atsem peut prendre une pause. D’une classe de 25 enfants,
on n’entend plus que les respirations, quelques toussotements en hiver, et
parfois le bruit vigoureux d’une succion sur une tétine. C’est peut-être le seul moment de la journée
où certains sont détendus. C’est aussi le moment de prendre quelques instants pour
les contempler, de s’attendrir de les voir encore si petits. Nombreux doivent
être ceux qui prennent encore leur biberon, certains pourraient même encore
téter… Je réalise combien ils doivent
être précieux pour leurs parents et la
confiance que ceux-ci nous font en nous les envoyant. Surtout, je me demande
bien à quoi ils rêvent et quels trésors sont cachés au fond de chacun d’entre
eux. Vont-ils parvenir à devenir pleinement eux-mêmes où se couleront-ils à
leur tour dans le moule préparé par la société ? Quel sera mon rôle là
dedans ? Oubliés les énervements éventuels du matin (non, vous n’êtes pas
sur le blog de la maîtresse parfaite).
Grâce à cet îlot de calme au milieu d’une journée trépidante, il est facile de se rappeler que ces enfants
méritent le meilleur de nous.
A 14h15, je quitte le dortoir pour rejoindre la classe avec
les –rares- enfants qui ne se sont pas endormis, en laissant la porte de
communication entrouverte… Selon l’envie des « irréductibles » nous
avançons le travail, faisons des arts visuels, des jeux de société…. Au plus
tard, nous réveillons les autres vers 15h20. Beaucoup ont besoin d’un petit
moment pour être tout à fait alertes, l’après-midi est plus le temps des
histoires et des jeux que celui des Apprentissages (avec un grand A ;)).
Avec des enfants reposés, l’ambiance de la classe est souvent plus détendue que
le matin. Décidément, prendre le temps
de faire la sieste est encore loin d’être un luxe.